administrer (to administer)

On administre un sacrement religieux, une punition ou un médicament, mais pas un test.

Ce faux ami est de plus en plus répandu au Canada francophone dans le monde de l’éducation, pour tout ce qui a trait aux examens, tests et autres évaluations.

En anglais, on dit effectivement to administer [a test/exam/assessement] au sens de « faire passer [le test/l’examen/l’évaluation] » aux élèves ou aux étudiants concernés. Mais en français, le verbe administrer ne peut être utilisé dans ce sens. Les définitions et les exemples du dictionnaire sont clairs : on peut administrer des biens (quand on en est responsable selon la loi), une population/région/ville (quand on est maire, président, etc.) et on peut administrer à quelqu’un un sacrement comme le baptême ou l’extrême-onction (quand on y est habilité par l’Église) ou encore un remède médical. On peut également, dans la langue familière, administrer à un individu qui se conduit mal ou qui fait des bêtises une punition corporelle, comme des coups, une fessée, etc.

Mais c’est tout. Autrement dit, lorsque l’anglais dit :

This assessment was administered to Grade 12 students on May 13.

on ne peut pas dire quelque chose comme :

Cette évaluation a été *administrée aux élèves de douzième année le 13 mai.

C’est tout simplement un anglicisme, sauf si vous considérez que l’évaluation en question est un sacrement ou encore une punition (mais même là, il vaudrait mieux dire quelque chose comme « Cette évaluation a été infligée aux élèves… »).

Le hic est bien entendu qu’il n’existe pas d’équivalent strict de l’anglais to administer dans ce sens en français, c’est-à-dire un verbe qui se construirait de la même façon (avec l’évaluation en complément d’objet direct et les élèves/étudiants en complément indirect introduit par la préposition à). Il faut accepter ici d’utiliser une tournure légèrement différente, comme :

Cette évaluation a été organisée pour les élèves de douzième année le 13 mai.

ou encore :

Cette évaluation des élèves de douzième année s’est déroulée le 13 mai.

Seulement, les choses étant ce qu’elles sont, les francophones du Canada qui connaissent le verbe to administer en anglais ont l’impression que, si on ne dit pas administrer en français, on ne dit pas exactement la même chose. C’est évidemment absurde, puisque tout ce qu’une phrase comme « This assessment was administered to Grade 12 students on May 13 » veut dire, c’est précisément que l’évaluation s’est déroulée à la date du 13 mai pour les élèves de douzième année. Les deux solutions correctes proposées ci-dessus sont donc parfaitement convenables et il n’y a pas de raison d’utiliser le faux ami administrer, sauf si on considère que l’anglicisme est entré dans l’usage et que son intégration est irréversible, ce qui est à mon avis loin d’être le cas.