Participe ou substantif ?

Traduire un participe passé (ou présent) en anglais par un participe en français est souvent une erreur. La fonction grammaticale elle-même est une fausse amie.

Prenons la phrase suivante, extraite d’une page Web du site d’Environnement Canada :

There may be an increased risk of respiratory and cardiovascular problems and certain types of cancer due to increased air pollution.  

La traduction fournie sur la version française de la page est la suivante :

Accroissement des risques de problèmes respiratoires et cardiovasculaires et de certains types de cancer dus à une pollution atmosphérique accrue.

Pour moi, c’est une traduction fautive, dans laquelle le traducteur a été victime de ce faux ami qu’est la forme grammaticale du participe passé. Bien entendu, il existe une forme verbale appelée participe passé aussi bien en anglais qu’en français et il est naturel de penser qu’elles sont strictement équivalentes.

Or ce n’est pas vraiment le cas. L’anglais a une particularité que n’a pas le français, qui est que, dans une expression comme « due to increased air pollution », l’élément central sur le plan sémantique n’est pas l’élément central sur le plan grammatical.

Car si l’on se pose la question de savoir quelle est la cause réelle de l’augmentation des risques de maladie, la réponse n’est pas la pollution elle-même. La réponse est que c’est l’augmentation de la pollution. Pourtant, dans l’expression anglaise, l’augmentation n’est exprimée que par le participe (« increased ») et non par le substantif, qui est l’élément central de l’expression sur le plan grammatical.

Je suis d’avis qu’un tel décalage entre le sens et la grammaire n’est pas naturel en français et que la traduction ci-dessus est, sinon fautive, du moins très maladroite et trop calquée sur l’anglais. Pour moi, il aurait fallu écrire quelque chose comme :

Accroissement des risques de problèmes respiratoires et cardiovasculaires et de certains types de cancer dus à l’augmentation de la pollution atmosphérique.

Autrement dit, il aurait fallu refaire coïncider l’élément central sur le plan grammatical avec l’élément central sur le plan sémantique.

(Je passe ici sur les autres problèmes posés par la traduction, par exemple le fait que c’est en réalité « accroissement » qui est l’antécédent de « dû », lequel devrait donc en réalité être au singulier. En général, quand il y a un problème de traduction dans une phrase, il y en a plusieurs.)

Le décalage en question ici est un phénomène très répandu en anglais, avec toutes sortes de participes (passés ou présents) qui sont l’élément central sur le plan sémantique, et il convient d’être toujours très vigilant lorsqu’on cherche à rendre de telles expressions en français.

Voici, histoire de contrebalancer l’exemple ci-dessus, un autre exemple tiré d’un site Web du gouvernement du Canada, dans lequel le traducteur a cette fois été vigilant. La page anglaise porte le titre :

REFUNDS AND REVOKED ELECTIONS DUE TO INCREASED REBATE RATE

Et la page française porte le titre :

REMBOURSEMENT ET CHOIX RÉVOQUÉS EN RAISON DE LA MAJORATION DE TAUX DE REMBOURSEMENT

On voit bien ici que le participe passé en anglais est devenu un substantif en français.

C’est l’approche qu’il convient d’adopter systématiquement quand on cherche à rendre les expressions de type participe + substantif en français, où elles deviennent généralement des expressions du type substantif + complément du nom.

Une réflexion sur « Participe ou substantif ? »

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